Le désastre de l’adaptateur PoE du Raspberry Pi

Lors de l’annonce du Raspberry Pi 3B+, en mars 2018, la fondation avait aussi annoncé un adaptateur PoE (Power over Ethernet), compatible avec ce modèle de carte. Il est sorti cet été, et c’est un désastre.

Le PoE (Power over Ethernet) est une solution intéressante pour intégrer facilement des appareils dans des endroits confinés. Le concept reste assez simple : en plus des données, le câble Ethernet va amener de l’énergie. La norme 802.3af standardise le fonctionnement, et le Raspberry Pi (heureusement) se conforme à ce dernier. C’est un sujet que j’avais déjà évoqué avec les bornes AirPort Extrême (il existe une variante PoE) mais un petit rappel ne fait jamais de mal.

Un switch PoE avec quatre ports PoE

Pour faire court, il existe des appareils qui peuvent envoyer de l’énergie (typiquement des switchs) et d’autres qui peuvent en recevoir, comme des caméras, des switchs (aussi) ou – ici – un Raspberry Pi. Pour éviter les chutes de tension, le PoE utilise une tension assez élevée dans l’absolu (48 V en général) et chaque port peut fournir en sortie environ 13 W (15 W en entrée, à cause des pertes éventuelles). Deux solutions classiques existent pour fournir de l’énergie : soit un switch doté de ports compatibles, soit un injecteur. J’ai un switch Netgear vendu environ 70 € qui dispose de huit prises Ethernet 1 Gb/s, dont quatre peuvent fournir de l’énergie. La seconde solution, l’injecteur, vise plus un équipement isolé. Il s’agit d’un petit boîtier qui fournit uniquement l’énergie et se place entre deux câbles Ethernet (un qui rentre, sans énergie, un qui sort, avec de l’énergie). On trouve des injecteurs actifs, à la norme 802.3af, pour environ 30 €. Attention, il existe aussi des systèmes passifs qui n’utilisent pas le standard et transmettent donc de l’énergie entre deux boîtiers propriétaires. Ils peuvent être dangereux pour vos appareils compatibles avec le standard, méfiez-vous.

L’adaptateur PoE

Le HAT PoE se présente sous la forme d’une carte qui se place au-dessus du Raspberry Pi. Compatible uniquement avec la version 3B+, il arrive avec quatre entretoises pour le fixer. Avant même de le brancher, j’ai noté quelques défauts à la limite du rédhibitoire. D’abord, la finition est franchement moyenne, avec des soudures pas très propre. Ensuite, les vis qui se placent sous la carte peuvent bloquer certains boîtiers. Enfin, l’installation du HAT bloque par défaut les GPIO et il faut un accessoire supplémentaire pour accéder aux connecteurs. Je n’ai pas eu le problème (en tout cas, pas encore) mais le connecteur qui sert à amener l’énergie au HAT est a priori assez fragile : certains ont cassé la prise en débranchant le HAT. On peut quand même noter que le HAT dispose d’une fente pour brancher un appareil photo, heureusement.

Elektor a cassé sa carte


La fente pour l’appareil photo


Ventilateur et GPIO bloqués


Les vis sous la carte bloquent certains boîtiers

A l’usage, le premier problème vient du ventilateur. Très petit (25 x 25), il n’est pas spécialement bruyant (sauf en pleine charge) mais a un gros défaut : il s’active régulièrement pour quelques secondes. J’en parlerais demain, car il existe une solution, mais en gros il démarre à 45°C et il s’agit de la température moyenne du SoC en idle. Donc il démarre quelques secondes, le SoC refroidit un peu, le ventilateur s’arrête, la température du SoC remonte… et ça recommence. C’est assez vite insupportable. Le pire, c’est que le ventilateur n’est pas forcément nécessaire : la partie PoE n’augmente pas vraiment la température. Il s’agit juste d’une sécurité placée là parce que les concepteurs supputent qu’un Raspberry Pi connecté en PoE sera dans une environnement confiné (et donc chaud).

Le bloc de quatre broches, qui amène l’énergie

Maintenant, les autres problèmes. Premièrement, ça siffle quand le Raspberry Pi est éteint. Genre vraiment fort. C’est mineur étant donné que la carte s’allume au branchement, mais ça reste énervant quand on arrête la carte manuellement. Deuxièmement, gros problème, le boîtier a tendance à déconnecter les ports USB. Alors, le problème n’est pas systématique et n’arrive pas avec tous les périphériques, mais c’est assez vite énervant avec un disque dur par exemple. Très régulièrement, le logiciel va couper complètement le port USB en considérant une surcharge, et donc déconnecter les périphériques. Dixit un des créateurs du Raspberry Pi, le problème est lié à un des composants qui gère l’USB sur les cartes, et toutes les cartes n’utilisent pas la même. De plus, le problème ne touche pas les périphériques qui consomment peu (une clé USB basique, un clavier, une souris, etc.). Pour le moment, les solutions éventuelles demandent des modifications matérielles, soit sur la carte soit sur le HAT, donc ce n’est pas très pratique.

Des soudures qui semblent un peu artisanales

Vous vous en doutez, je ne suis pas très content de ce HAT, qui en plus reste finalement assez cher (comptez une bonne vingtaine d’euros). Je ne vous le conseille donc pas, et si vous voulez vraiment du PoE, un injecteur passif avec une prise Micro USB offrira les mêmes fonctions sans les problèmes (en théorie). Enfin, pour terminer, il existe une solution pour les bricoleurs : vous pouvez récupérer un régulateur de tension (LM2596HV) et le relier en entrée aux broches qui fournissent le 48 V de la carte et en sortie aux broches GPIO qui permettent d’alimenter le Raspberry Pi en 5 V. Dans la pratique, c’est de toute façon exactement la façon de fonctionner du HAT officiel.