Lire une Miniature Card

Si vous avez déjà regardé Wikipedia dans la section des cartes mémoire (pourquoi pas, chacun ces kinks), vous avez peutêtre vu la page des MiniCard, ou Miniature Card. C’est un format de carte rare, ancien, et obscure. Tout ce que j’aime, donc.

Je dois être franc : ça n’a pas été simple. Franchement, à part Foone sur Twitter, vous ne verrez personne parler de Miniature Card. Pour tester, j’ai deux appareils compatibles et trois cartes. Pour les appareils, un HP PhotoSmart (le premier appareil photo numérique de la marque) et un Olympus D1000, un dictaphone numérique. Question cartes, j’ai deux cartes de 2 Mo (HP et Olympus) et une carte de 8 Mo, achetée sur eBay. Il n’existe pas tellement d’autres appareils compatibles : quelques appareils photo (des clones du HP), quelques vieux PDA… et c’est tout.

Trois cartes


Les connecteurs sont sous la carte

En 2022, évidemment, le premier réflexe est de trouver un lecteur USB. Et ça n’existe pas : les cartes datent du milieu des années nonante, à une époque ou l’USB est très rare, récent et mal supporté. J’ai trouvé quelques références à des lecteurs intégrés dans des claviers (chez Intel, ne cherchez pas la logique de l’intégration dans un clavier), mais la solution de base va être le PC Card (PCMCIA). J’ai reçu un lecteur Olympus (le PC Card Adapter CA1) avec le dictaphone, j’ai aussi un MC-AD1 de chez Konica, pensé pour les appareils photo. En pratique, les deux sont identiques.

Deux lecteurs PC Card identiques


La carte s’insère directement au milieu

Avec le dictaphone, j’ai aussi eu les pilotes, pour Windows 95. C’est ce qui m’a bloqué un peu : trouver un PC avec du PC Card et qui fonctionne sous Windows 95, ce n’est pas si évident. J’ai acheté récemment un Thinkpad sous Windows Me pour cet usage, en me disant que l’OS n’est qu’un Windows 9x un peu amélioré… et c’était une erreur dans un sens. En fait, ça m’amène à un point : le fonctionnement des cartes. C’est en lisant cette interview du fondateur de M-Systems que j’ai compris mon problème. Faute de lecteur, je pensais naïvement que les Miniature Card fonctionnaient comme les autres cartes du marché, en montrant à l’OS un système de fichiers classiques (généralement FAT16), mais ce n’est pas le cas des Miniature Card. En réalité, les cartes ne contiennent pas de contrôleur – c’est aussi le cas des SmartMedia – mais (surtout) il n’y a pas d’abstraction matérielle pour la gestion des fichiers. Dans les cartes classiques, c’est la carte elle-même qui va gérer la flash (ou le lecteur physique dans le cas des SmartMedia) : l’OS voit un système de fichiers, il envoie ses commandes, la carte (ou le lecteur) s’arrange pour faire sa popote interne. L’avantage de cette solution, c’est qu’il n’est pas nécessairement obligatoire d’avoir un pilote : une CompactFlash branchée en PC Card fonctionne comme un disque dur par exemple (en pratique, avec Windows 95 ou 98, il faut un pilote pour le stockage de masse en USB tout de même). Avec les Miniature Card (et pas mal de cartes de stockage en PC Card), c’est l’OS qui gère la mémoire, avec un système de fichiers spécifique, TrueFFS. S’il n’est pas présent (et il n’était pas installé en standard sous Windows), ça ne va pas fonctionner.

Un APN compatible


Un dictaphone numérique

Du coup, pour revenir à mes essais : j’ai installé les pilotes du lecteur (de la carte, donc, en réalité) sous Windows Me, mais ils étaient prévus pour Windows 95. Ce point a amené deux choses : quelques écrans bleus et l’impossibilité de lire les cartes. Et le readme était assez clair : il ne faut pas formater avec les outils de Windows, étant donné que le système de fichiers est spécifique. En cherchant, je suis tombé sur une page du site d’Olympus Canada, qui explique que pour Windows 98 (et Me, du coup), il ne faut pas utiliser les pilotes fournis mais ceux de l’OS. En fait, le CD de Windows contient un dossier avec les pilotes de M-Systems pour gérer le système de fichiers. La bonne nouvelle, c’est que je n’ai pas eu besoin de graver le disque : il suffit de déplacer le contenu de /drivers/Storage/flash (600 ko) sur la machine pour l’installer, avec un clic droit sur trueffs.inf (Windows Me a l’avantage d’avoir un pilote standard pour l’UMS, donc on peut utiliser une clé USB).

Sans le pilote du système de fichiers, vous aurez ça

Après un redémarrage, ça fonctionne : le contenu de mes trois cartes est visible dans l’explorateur de fichiers. Il y a même un menu spécifique pour formater les cartes.

Une carte de l’APN


La carte du dictaphone


On peut formater


Le menu de M-Systems


Windows dit « FAT »


On peut récupérer l’audio, du coup

Le problème, c’est la compatibilité. Comme les cartes dépendent fortement du logiciel, ça semble tout de même assez aléatoire. Pour tout dire, la carte du dictaphone donne une erreur dans l’appareil photo numérique, et les cartes de l’appareil ont le même comportement dans le dictaphone. J’ai essayé de formater une des deux cartes de l’APN dans le dictaphone, mais sans succès. Du côté de Windows, c’est un peu mieux : les trois sont lisibles.

La carte de l’APN ne fonctionne pas dans le dictaphone

Après, il faut bien comprendre que le format d’Intel n’a jamais vraiment trouvé le succès. Les cartes utilisent a priori de la flash NOR (lente en écriture), la compatibilité est aléatoire et la lecture sur un PC parfois compliquée (surtout en l’absence de lecteurs USB). Les autres formats de cartes mémoire, plus efficace (CompactFlash et SD, au moins) ont donc tout balayé assez rapidement.