TokenTalk : de l’AppleTalk sur Token Ring entre deux Mac

J’aime bien tester les solutions de réseau un peu atypique/vieille (ou moderne). Et dans mes cours il y a de nombreuses années, j’ai entendu parler – sans jamais en voir – du Token Ring d’IBM. Ce concurrent de l’Ethernet dans les années 80 était en partie supporté par Apple, et comme j’ai trouvé une carte TokenTalk pour mon Macintosh IIsi, j’ai tenté.

Je ne suis pas ingénieur réseau, et le but était surtout de voir comment ça marchait, donc je risque de faire des erreurs, pardonnez-moi.

Token Ring, c’est quoi ?

Token Ring est une technologie IBM, concurrente d’Ethernet, qui sert de transport physique pour un réseau. L’idée d’origine est de créer une boucle entre les ordinateurs, avec un jeton qui passe de machines en machines. Quand il y a des données à envoyer, elles circulent dans la boucle jusqu’à la bonne machine. Quand il n’y en a pas, le jeton circule sans données (je schématise un peu). La technologie évite les collisions comme en Ethernet, qui utilisaient une grande partie de la bande passante avec un hub. Physiquement, l’implémentation du Token Ring n’est pas un anneau – je sais, c’est contre-inutitif – mais une topologie en étoile. Au niveau débit, le Token Ring travaille à 4, 16 ou 100 mégabits/s, même si cette dernière est rare. En pratique, le Token Ring à 16 Mb/s est très nettement plus rapide que de l’Ethernet 10 Mb/s avec un hub (plus que la simple différence de débit).

La carte TokenTalk Apple, aussi longue que le Mac


Le CPU 68000 de la carte

TokenTalk, A/ROSE

Première étape, une carte TokenTalk pour un Macintosh IIsi. Avec des Mac, il est possible d’utiliser le protocole AppleTalk sur une liaison LocalTalk, mais aussi Ethernet (EtherTalk) ou sur du Token Ring (TokenTalk). Une fois la liaison physique en place, on peut donc utiliser de l’AppleTalk de façon assez transparente. Apple a sorti quelques cartes compatibles dans les années nonante, pour les Macintosh II. Techniquement, c’est assez impressionnant : la carte TokenTalk est énorme – aussi longue que le Mac -, se connecte en NuBus et dispose de son propre processeur (un Motorola 68000 à 10 MHz, plus que le premier Mac) et son propre OS. A/ROSE est un système embarqué dans quelques cartes (la TokenTalk, une carte Ethernet, une carte ISDN, etc.) qui gère toute la communication sans faire appel au CPU du Mac. En gros, Le Mac demande l’envoi des données, A/ROSE gère tout avec son CPU et envoie juste le résultat. Cette solution est efficace mais onéreuse et sera assez vite abandonnée.

TokenTalk


La carte fonctionne seulement à 4 Mb/s


Quelques informations


Partage de fichiers en TokenTalk

Ma carte dispose d’une prise DE-9 pour la connexion au réseau Token Ring et fonctionne avec les pilotes intégrés dans l’OS. Plus exactement, les disquettes d’installation de System 6 ou 7 contiennent les pilotes. Avec mon Macintosh IIsi, j’ai dû ressortir les disquettes et lancer l’installation des composants nécessaires (un Floppy Emu sert pas mal dans ce cas). Quand la carte est installée, une option permet d’avoir des informations sur le réseau Token Ring et une option TokenTalk apparaît dans Réseau. La carte dont je dispose est une carte qui ne dépasse pas 4Mb/s (l’Ethernet atteignait 10 Mb/s à l’époque, le LocalTalk seulement 230 Kb/s) mais une variante 16 Mb/s existe.

Dans un Mac plus moderne

Pour mon réseau, j’ai utilisé un second Mac avec une carte Token Ring. Pour des questions pratiques, j’ai choisi mon Power Mac G3 sous Mac OS 9. Pour la carte, j’ai simplement acheté une carte de chez Madge sur eBay, en PCI (Smart 16/4 MK2). Ce modèle se trouve assez facilement pour moins d’une dizaine d’euros. La société proposait à l’époque des pilotes pour Mac OS que j’ai réussi à trouver après quelques recherches. La carte dispose d’une prise DE-9 et d’une prise RJ45 pour la connexion à un réseau. Attention, le RJ45 nécessite des câbles blindés (a priori catégorie 6) et du matériel spécifique, il ne s’agit pas d’Ethernet. Une fois les pilotes installés, rien de spécial : on peut forcer le débit (4 Mb/s ici, la carte supporte aussi le 16 Mb/s) et utiliser la carte en AppleTalk.

La carte, forcée en 4 Mb/s


Le Mac IIsi vu en TokenTalk


Son disque dur partagé

La liaison

Vient la partie amusante, la liaison physique. En Token Ring, physiquement, on travaille en étoile. Chaque station doit être reliée à une sorte de hub (le MAU), qui va gérer l’anneau en interne, il n’est pas prévu de relier deux ordinateurs directement comme en Ethernet. Le MAU peut ensuite être relié à d’autres MAU pour former un réseau plus large. Trouver un MAU, ce n’est pas simple et j’ai eu un peu de mal. La surprise a été la taille du bouzin, c’est assez énorme parce que les prises sont énormes. Le MAU que je possède, acheté à vil prix sur eBay, dispose de six prises hermaphrodite (IBM Data Connector). Quatre permettent de connecter les machines du réseau, deux autres permettent de connecter les MAU entre eux. Comme le montre bien l’image issue de Wikipedia, le concept d’anneau reste présent quand on utilise plusieurs MAU : ils doivent former une boucle.

Le diagramme de Wikipedia


Les deux ordinateurs reliés au MAU


Les prises qui permettent de placer le MAU dans un anneau

Enfin, j’ai commandé deux câbles de liaison pour connecter les cartes au MAU (aux Etats-Unis). Les câbles proposent d’un côté une prise DE-9 (comme les prises séries), de l’autre un connecteur hermaphrodite. Les prises, énormes, se fixent avec une sorte de bascule sur le MAU.

Une liaison qui fonctionne

Une fois la liaison effective et les cartes installées, ça fonctionne comme avec du LocalTalk ou de l’EtherTalk. Il suffit de sélectionner le Token Ring dans les options, d’aller dans le sélecteur et d’accéder aux partages. Comme souvent avec les vieux systèmes Apple, c’est très simple et efficace. A priori, on peut même faire un lien entre TokenTalk et EtherTalk avec un Mac qui a deux interfaces, mais là, je suis resté sur une seule technologie. Ici, pour l’exemple, j’ai partagé le disque dur du Macintosh IIsi (sous System 7.1) vers le Power Mac G3 sous Mac OS 9.2.2. Les transferts sont assez lents, mais c’est assez logique : j’utilise du Token Ring 4 Mb/s avec deux machines, donc on reste forcément en-dessous de l’Ethernet 10 Mb/s mais bien devant le LocalTalk.

Prochaine étape, du 10BASE5 ou du FDDI ?