Advantix Preview, l’appareil photo le plus idiot du monde ?

J’en parlais la semaine dernière, je m’amuse pour le moment avec des pellicules APS, et je suis tombé sur un appareil photo dont le concept me semble idiot : un appareil argentique (APS, donc) avec un écran. L’Advantix Preview de Kodak, sorti au début des années 2000, combine donc une partie argentique et une partie numérique. Pour le pire des deux mondes.

Un mot sur l’APS (Advanced Photo System). Ce format de pellicule lancé par Kodak en 1996 (un peu avant l’avènement du numérique, bravo les gars, bien joué) devait simplifier l’usage de l’appareil photo par le grand public. Dans les avantages pratiques, on peut noter que la pellicule était placée dans une cartouche, ce qui permettait d’enlever et remettre la pellicule rapidement. Plus largement, l’APS propose plusieurs ratio d’image (j’y reviens), des métadonnées (heures, titre, etc.) ainsi que quelques informations pour le développement. De plus, la taille des cartouches permet de proposer des appareils photo compact (les Ixus numériques de Canon reprennent directement le design des Ixus APS).

Une cartouche APS

Un des problèmes de l’APS vient du format du négatif : plus petit que le 24×36 classique, il offre une qualité moins bonne. Ce n’est heureusement pas aussi mauvais que le Kodak Disc, mais ça reste moins bon que le 24×36. La gestion des ratio est un des trucs bizarres de l’APS. Techniquement, les photos sont en format 16:9 (comme nos TV modernes), le format H. Les appareils APS proposent deux autres ratio, le C (3:2, comme les photos classiques) et le P (panorama, plus large). En pratique, c’est idiot : le H donne un meilleur résultat au niveau de la qualité, et C et le P ne sont que des découpages du premier. En théorie, l’APS doit être développé dans le bon format, en pratique, ce n’est pas toujours le cas : lors d’un voyage scolaire avec un appareil APS il y a longtemps, je me suis retrouvé avec des photos mal développées. Pour l’anecdote, l’APS-C a plus ou moins donné le format des capteurs des reflex numériques milieu de gamme actuels (notamment chez Canon). Plus ou moins, parce que l’APS-C de Canon reste physiquement un rien plus petit que l’APS-C réel.

Le pire du pire : de l’APS panorama développé en 3:2

L’Advantix Preview

L’Advantix Preview, donc. C’est un appareil photo de Kodak – Advantix est le nom de la gamme APS – sorti vers 2000. Il s’agit d’un argentique APS avec un écran LCD, qui va servir à une chose : afficher la photo après l’avoir vue. Une fois la photo prise, un bouton Preview permet en effet d’afficher la photo sur l’écran LCD de l’appareil. Ca permet en théorie de voir si la photo est correcte et éventuellement d’indiquer qu’elle ne doit pas être imprimée (ou qu’elle doit être imprimée plusieurs fois). Pour moi, le concept reste totalement sans intérêt : il combine les défauts de l’argentique avec les défauts du numériques et augmente le coût de l’appareil.

Le flash caractéristique des APS Kodak

D’un point de vue technique, il contient un capteur numérique (a priori basse définition, je suppose VGA vu l’époque) et un mauvais écran, en plus de la partie nécessaire à la photo en APS. Un système de miroir interne permet de prendre la photo numérique en même temps que la photo analogique. D’un point de vue pratique, ça reste tout de même assez idiot : l’écran est mauvais et ne permet pas réellement de voir si la photo est correcte ou pas, ne serait-ce que parce que les réglages et la sensibilité du capteur ne sont pas les mêmes que ceux de la partie qui enregistre les photos. Ensuite, il ne permet pas de supprimer une photo, mais juste d’indiquer dans la pellicule que la photo ne doit pas être imprimée, en supposant que le laboratoire prenne en compte les données. Enfin, l’appareil n’a pas de mémoire. Il ne montre donc que la dernière photo prise, dans une mémoire RAM. Impossible de revenir en arrière, de vérifier le contenu, etc. C’est totalement éphémère et c’est un peu con : une simple mémoire de 2 ou 4 Mo aurait permis de garder une version numérique, même en basse définition, de ce que contenait la pellicule.

Les commandes

D’un point de vue pratique, l’appareil permet de prendre des photos, avec un second écran alphanumérique (sous le LCD couleur) qui affiche quelques informations. On peut sélectionner quelques métadonnées (date, des titres prédéfinis, etc.) ainsi que le ratio. A la visée, l’appareil propose le choix du ratio avec une sorte de masque qui apparaît dans le viseur. L’ergonomie reste assez mauvaise, le bouton de zoom servant à valider certaines options, mais c’était le cas aussi dans les numériques de l’époque.

L’écran avec une photo panoramique

Le problème, c’est qu’il combine les défauts de l’argentique (nombre de photos limité, impossible de revenir en arrière, etc.) avec des défauts du numérique (l’écran de mauvaise qualité, l’interface) mais sans les avantages, comme justement la possibilité de supprimer une photo. Accessoirement, il s’alimente avec des piles au lithium (CR123), ce qui ne simplifie pas les choses. Le seul véritable avantage par rapport à un numérique de l’époque (en grand public) vient de la qualité : l’APS, même en étant un mauvais format argentique, reste quand même souvent meilleur qu’un capteur de 1,3 ou 2 mégapixels du début des années 2000. Mais c’est en supposant que le laboratoire développe correctement, idéalement sur un CD (en Photo CD ?).

Avec l’appareil que j’ai trouvé sur LeBonCoin, j’ai reçu des pellicules APS (périmées, mais c’est un peu évident en 2018). J’ai donc fait quelques photos que je vais essayer de développer et scanner avec des appareils APS dédiés (j’en reparlerais). Et du coup, j’espère vous montrer le résultat.